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    Григорьев С.Т. (grigoryev-s-t.lit-info.ru)
  • Перовский — графу Нессельроду К. В., 21 апреля 1821 г.

    Перовский Н. И. Письмо графу Нессельроду К. В., 21 апреля 1821 г. // Батюшков К. Н. Сочинения: В 3 т. — СПб.: П. Н. Батюшков, 1885—1887.

    1887


    ’empresse de vous informer que conformément au contenu de votre lettre du 4 avril, qui m’a été adressée par estafette, j’ai sur le champ pris les mésures nécessaires pour faire partir m-r Batuchkof, dont l’état devenait de jour en jour plus alarmant. Après être convenu avec m-r Mulhausen de tout ce qu’il y avait à faire pour remplir les intentions bienfaisantes de Sa Majesté à son égard, nous nous sommes arrêtés au parti de préparer d’abord tout ce qu’il fallait pour son départ soit de bon gré par les moyens de persuasion, soit enfin d’autorité. D’après le caractère de sa maladie qui ne nous laissait aucun espoir d’effectuer son départ par les voies de conciliation, nous sommes convenus de ne lui rien dire jusqu’au moment où tout serait prêt, parcequ’il fallait prévoir, que dès-lors il aurait employé tous les moyens possibles de déstruction sans qu’aucune surveillance puisse y remèdier à moins de le garotter, chose à laquelle je n’ai pas eu recours jusqu’à présent à son égard, réservant cette ressource pour la dernière extrêmité. Enfin, avant-hier que tout était préparé et même la camisole à longues manches, j’ai préalablement envoyé chez lui le docteur Mulhausen, qui devait lui dire, que j’avais reçu de votre excellence une lettre à son sujet pleine des preuves les plus flatteuses de l’intérêt que l’Empereur prenait à lui, dont la preuve était que j’avais ordre, vu l’état de sa faible santé, de songer aux moyens de le faire arriver à Pétersbourg en le confiant pendant ce voyage aux soins d’un homme aussi éclairé qu’humain (et cet homme lui était designé dans la personne du docteur Lang qui l’accompagne); enfin j’avais recommandé à m-r Mulhausen de flatter autant que possible sons amour-propre et de ne faire voir dans tout ce qu’il dirait qu’une preuve insigne et peu commune de l’interêt de Sa Majesté. Malgré toutes ces précautions nous avons trouvé dans lui l’opiniâtreté à laquelle nous nous étions attendus. Je suis arrivé au moment où il étaità railler contre le docteur Mulhausen tout ce qu’un homme dans son état peut imaginer pour rejeter une idée si opposée à celles que lui inspire son état; en entrant je lui ai confirmé ce qu’il avait déjà appris de m-r Mulhausen et toujours dans le même sens, c’est-à-dire, comme une preuve extrèmement flatteuse de l’attention que Sa Majesté lui accordait; il m’a repondu, comme à m-r Mulhausen, dans des termes assez peu délicats; enfin je lui ai lu quelques phrases de la lettre de votre excellence qui ne pouvaient que le flatter; je lui ai montré la signature; mais tout en vain, j’ai passé plus d’une heure à épuiser tout ce que l’eloquence persuasive peut imaginer, secondé par m-r Mulhausen; tout a été épuisé, et il me répétait sans cesse: Je puis vous assurer en homme d’honneur qu’il n’y a pas de puissance au monde qui puisse me faire partir et changer de dessein“. Alors je lui dis d’un ton ferme: „Eh bien, monsieur, puisque vous résistez au désir de l’Empereur, à tout ce que la raison peut vous présenter, je vous laisse pendant une demie-heure avec m-r Mulhausen, persuadé qu’il parviendra à vous convaincre; mais si je vous trouve la même résistance, je vous fais partir pour obéir aux ordres de Sa Majesté“. „Je vous répète encore une fois“, ajouta-t-il, — „que je ne puis pas et qu’aucune autorité ne me fera partir“. Je suis sorti. Au bout d’une demie-heure j’ai fait appeller m-r Mulhausen pour lui demander s’il y avait espoir de le persuader. „Aucune au monde“, me dit-il; — „il ne reste que la force“. Alors je le renvoyai auprès de lui et je fis mes dispositions en conséquence. J’entre accompagné de 5 ou 6 personnes et lui dis encore, que je le prie de ne pas me forcer à user d’autorité; il me dit qu’à moins qu’on lui lie les pieds et les mains il ne partira pas; je lui répondis que je serai faché d’en venir là, mais que je le ferai lier. „Alors je deviendrai furieux, enragé; vous ne savez pas ce que je ferai“. Sans attendre plus longtemps j’ordonnai qu’on l’habille, car il était en robe de chambre et en chemise; on trouva des bottes et je dis qu’on commence à lui mettre ses bottes; jusque là il ne bougeait pas, mais quand on commença à lui mettre une botte, alors il arrêta l’homme et lui dit avec impatience, mais sans courroux: „Attendez, ce n’est pas comme cela“. Il se lève et va dans une autre chambre, comme de raison accompagné; là il change de linge et s’habille lui-même, toujours en pestant contre moi. En attendant j’étais occupé à emballer les éffets car la voiture était avancée, et il était important de ne pas perdre un moment. Une fois habillé, il est venu à moi me dire, qu’il était faché de devoir changer d’opinion à mon égard, que jusque là il m’avait toujours éstimé, mais que maintenant il ne voyait en moi qu’un ennemi et qu’il me souhaitait tout plein de malheurs. En réponse je l’ai pris par la main et l’ai assuré que jamais il n’avait eu autant de raison de m’être reconnaissant, mais je lui dis que la voiture était prête et qu’il fallait descendre; comme il voyait qu’il n’y avait plus à discuter, ni à raisonner, il m’engagea à me retirer disant que je le gênais et qu’il descen-derait lui-même puisqu’il voyait que tout était prêt; je le pris par la main amicalement (car je craignais la descente de l’escalier) et assurant que je voulais le conduire jusqu’à la voiture et lui souhaiter un bon voyage, je le conduisis en effet jusque dans la voiture, et enfin elle partit. Vous dire, monsieur le comte, ce que cette expédition m’a couté et le mal qu’elle m’a fait serait impossible, mais certainement vous le sentirez. En descendant l’escalier, il m’a régalé encore de quelques malédictions aux quelles je n’ai répondu que par l’expression de l’intérêt le plus tendre; mais il était temps que cela finisse, car je sentais mes forces s’épuiser, et je ne sais pas où j’ai pris cette résolution et cette fermeté. Vous verrez par la manière dont j’ai disposé son voyage que rien n’a été oublié; je n’ai pas été forcé de recourir à la camisole, mais elle était préparée et je l’ai remise au docteur Lang. Je l’ai adressé à m-r Olenin ne connaissant pas ses parents et sachant combien m-r Olenin lui est attaché. J’espère qu’il arrivera heureusement, et certainement s’il se rétablit jamais, j’aurai la safisfaction d’y avoir grandement contribué. J’attends avec bien de l’impatience de ses nouvelles.

    ’ai l’honneur d’être avec un profond respect, monsieur le comte, de votre excellence le très humble et très obéissant serviteur N. Peroffsky.

    ’elle se ressent encore du désordre que le malheureux Batuchkof a produit dans mes idées. Veuillez me le pardonner.